D’après des publications devenues virales sur Facebook et WhatsApp au cours du mois de février 2022, ce quartier de Douala 5e est déclarée zone rouge de choléra. Après vérification auprès de la délégation régionale de la santé pour le Littoral et du chef de district de santé de Bangue, il n’en est de rien.

Depuis plusieurs semaines, des publications selon lesquelles Makèpè Missokè est une zone rouge de Choléra sont devenues virales sur la toile. Des comptes et pages Facebook, ainsi que des groupes WhatsApp ont abondamment relayé cette nouvelle. Dr Roger Etoa, médecin de Santé publique écrit sur son compte Facebook le 22 février 2022 :« OFFICIEL ! Makepe Missoke déclaré zone rouge de choléra. Ne boire aucun fluide, ni manger des fruits ou légumes venant de là. Aux premiers signes et Symptômes (Diarrhée et/ou vomissements), se rendre au Centre médicalisé de Bonamoussadi où la prise en charge est gratuite. ».

Quelques jours plus tard, la publication a généré 31 commentaires, 53 partages et 78 réactions.  Plusieurs journalistes relaient cette information, notamment Carole Leuwé, (en freelance) et Aimée Cathérine Moukouri de Canal 2 international. Toutes deux citent Dr. Roger Etoa comme la source de l’information. Des pages telles que celles de « la radio Dynamique », « Le Cameroun c’est le Cameroun » et « C’est le moment », l’ont largement repris. Chacune y apporte une touche particulière, d’où la variété des illustrations.

A lire aussi : Covid-19 : plus de 90% de la population de l’Est ne se lave plus les mains

Vérification

Joint au téléphone, Dr Roger Etoa indique que l’information est partie d’un groupe WhatsApp de médecins. Il confie néanmoins que le terme « Zone rouge » n’est pas celui approprié en santé publique, mais dit l’avoir employé pour faciliter la compréhension des populations. Ce qui explique certainement la modification apportée dans sa publication plus tard. Précisément sur l’expression « zone rouge », changée en « Zone endémique ».

Pour expliquer le choix du terme, le médecin lanceur d’alerte indique : « Comme tout le monde ne peut pas comprendre ce que c’est qu’une zone endémique, on a parlé de zone rouge ». Tout en insistant sur le fait que le quartier est une zone à risque. Ce que confirme d’ailleurs la délégation régionale de la Santé publique pour le Littoral. Qui affirme qu’il y a des cas de Choléra dans ce quartier, mais réfute l’information largement partagée. « Quand un cas de choléra est confirmé quelque part, cette zone est en épidémie », laisse-t-elle entendre.

Sans apporter plus de détails, Dr. Hans Mossi, coordonnateur du Centre régional de prévention et de lutte contre les épidémies (Cerple) pour le Littoral affirme lui aussi que, Makèpè Missokè n’est pas une zone rouge. « Zone rouge ? Non », soutient Dr Hans Mossi en réponse à notre question sur Whatsapp. D’après le 10e rapport du Sitrep sur la situation de la gestion du cholera du 14 au 20 février 2022, le district de Bangue, auquel est rattaché le quartier Makèpè, a enregistré 8 cas de choléra, et aucun décès. Alors que la région comptait déjà 26 cas et 2 décès.

Sur la cartographie contenue dans le 10è rapport du Sitrep, des districts touchés par le Choléra au 20 février 2022, on a ceux de Bonassama, New-Bell, Deïdo, Nylon, Logbaba et Bangue qui sont colorés en rouge, sans aucune mention de «zone rouge». Joint également au téléphone, Dr. Nanga, la Cheffe du District de Bangue, infirme l’allégation sur Makèpè Missokè. « Ce n’est pas une zone rouge. Je n’ai que deux cas de maladie, et zéro décès », précise-t-elle. Cette information est confirmée dans le N°5 du rapport (fichier Pdf) de la situation de la gestion du choléra pour la période du 7 février au 7 mars 2022. Qui relève que 12 districts sont en épidémie dans le Littoral. A savoir : Boko, Bonassama, Cité des palmiers, Deïdo, Logbaba, Japoma, Melong, New-Bell, Njombé-Penja, Nkongsamba, Nylon et Bangue qui compte 2 cas confirmés, 16 suspects et 1 décès.

Pour pousser la réflexion, Data Cameroon a cherché à savoir ce qu’est exactement une zone rouge. Dr Vanessa Kouatchouang, épidémiologiste, déclare qu’il s’agit d’une zone où sévit une maladie, une zone où la contagiosité et le taux de mortalité sont élevés.  Soit une définition pas très éloignée de celle de l’endémie. « On dit qu’une zone est endémique lorsque la maladie y est en permanence, comme c’est le cas du paludisme. », renseigne-t-elle.

Cette information survient alors que l’épidémie de choléra refait surface dans certaines régions du Cameroun, dont le Littoral. Et que l’état vétuste dans lequel se trouve le quartier Makèpè Missokè, le rend favorable à la maladie. A ce jour, la région du Littoral enregistre 260 cas suspects, 57 cas confirmés et 16 décès (5 confirmés et 11 suspects).

Michèle EBONGUE

A lire aussi : Covid-19 : 3/10 de ménages passent une journée sans manger au Cameroun