Aide publique : Les premières secousses de Trump au Cameroun

Sur les 78 décrets signés le 20 janvier 2025 par Donald Trump, président des USA, les pays du Sud dont le Cameroun grincent déjà les dents. En ligne de mire, des appuis en santé qui transitaient par des agences américaines sont suspendues pour 90 jours.

 Il est un peu plus de 14h à Douala ce 21 janvier 2025. Un vent frais circule sur la ville malgré le soleil qui est au zénith. Les pluies tombées quelques jours auparavant, ont légèrement dépoussiéré la ville. Cependant, chez certaines Organisations non gouvernementales (Ong) bénéficiaires du Fonds mondial dans le cadre de la lutte contre le Vih, la tuberculose et le paludisme, un email venu de Washington, plonge certains employés dans l’expectative.

Selon le contenu auquel DataCameroon a eu accès, on peut lire « cher partenaire de mise en œuvre, j’espère que ce message vous trouvera en bonne santé » commence l’auteur par une formule de politesse. « Je vous écris pour faire le point sur la pause de 90 jours récemment annoncé et pour partager avec vous des ressources pertinentes » l’interlocuteur plante le décor. Et de poursuivre de façon sentencieuse et sans appel, « l’USAID (agence américaine d’aide au développement NDLR) met en œuvre une pause temporaire dans l’attente de nouvelles orientations liées au décret sur la réévaluation et la réorientation de l’aide étrangère des Usa ».

Cette nouvelle fait suite à un ensemble de décrets pris le 20 janvier dernier par le nouvel occupant de la maison blanche. « On attend encore que la direction se prononce » fulmine une responsable d’Ong basée à Douala concernée et qui a requis l’anonymat. « La Chine a dit qu’elle va reprendre tout ça » poursuit notre source. Cependant, il ne nous a pas été possible de vérifier cette affirmation vraisemblablement issue des commentaires entre collègues.

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Toujours est-il que ces premières mesures qui rentrent dans le sillage du retrait des USA de l’organisation mondiale de la santé (OMS), aura des répercussions soutenues dans le cadre des appuis du pays de l’oncle Sam à la santé des pays du Sud. Dans le cadre de la lutte contre le Vih, le paludisme et la tuberculose, quelques données permettent déjà d’apprécier le niveau d’impact de cette décision.

Le 28 mars 2022, Peter Sands, directeur exécutif du Fonds mondial indiquait dans une note que « Les États-Unis font preuve d’un extraordinaire leadership en santé mondiale depuis la création du Fonds mondial il y a 20 ans. Par le travail d’organisations comme le Plan présidentiel d’urgence pour la lutte contre le Sida (PEPFAR), l’Agence des USA pour le développement International (USAID), le Plan présidentiel des USA pour la lutte contre la Malaria (PMI) et par leur soutien indéfectible au Fonds mondial, les États-Unis sont d’ardents défenseurs de la lutte contre le VIH, la tuberculose et le paludisme ». En 2021, les USA étaient les premiers contributeurs du Fonds mondial avec un peu plus de 17 milliards de dollars versés à ce mécanisme depuis 2004 couvrant ainsi 33% de l’ensemble des contributions des donateurs. A ce jour, selon un rapport élaboré par Independant observer of the global Fund, environ 72% de ces fonds sont versés aux pays de l’Afrique Subsaharienne pour lutter contre le Vih, le Paludisme et la tuberculose.

Peur sur les budgets

Même si ces fonds ont plusieurs fois fait l’objet de soupçons de détournement par les pouvoirs publics, bénéficiaires de premier plan, la crainte de voir ces maladies gagner en intensité est de plus en plus grande. C’est le cas de soupçons relevés par la presse en 2024 sur la base d’une note adressée au Ministère de la santé sur des « dépenses non conformes ».

Cependant, face à ces sorties tonitruantes de Donald trump, certains observateurs locaux prescrivent la prudence. C’est le cas du Dr Romeo Saa Ngouana, enseignant et chercheur au Centre africain d’études internationales diplomatiques, économiques et stratégiques (CEIDES). « Un président arrive toujours avec de grandes annonces, mais chaque pays fonctionne toujours avec ses équilibres » précise-t-il.

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D’après un rapport d’audit des financements du Fonds mondial au Cameroun, 88% de l’enveloppe budgétaire de ce mécanisme sont gérés par le ministère de la Santé publique (Minsanté). Toute l’enveloppe étant consacrée à la lutte contre le Vih, paludisme et la tuberculose, il y a un risque dans le relâchement des mesures d’accompagnement. Le Minsanté qui a fait voter son budget 2025 pourra-t-il alors réaménager pour faire face à ce défi qui s’impose à lui ?

Paul- Joel Kamtchang

 

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