Crise post-électorale : dans l’arrière-pays, le calme masque la cherté de la vie
À Sa’a et Obala dans la Lekié, la vie semble paisible après le scrutin. Mais derrière le calme, la peur n’a pas complètement disparu et les prix continuent de grimper.
A Sa’a, une commune située dans le département de la Lekié, région du Centre, la vie suit son cours. Les rues et carrefours grouillent de monde. Comme à l’accoutumée, les mototaxis sillonnent les pistes, les élèves vont à l’école et les commerçants poursuivent leurs activités. Pourtant, dans l’ensemble du pays, la quiétude habituelle n’est pas encore revenue depuis les tensions post-électorales déclenchées le 27 octobre 2025, jour de la proclamation des résultats du scrutin du 12 octobre 2025.
« Ce jour-là (27 octobre 2025, Ndlr), j’ai gardé mes enfants à la maison, car je ne savais pas comment les choses allaient tourner », raconte une institutrice à l’Ecole publique groupe I de Sa’a. « Sur les réseaux sociaux, les informations annonçaient des soulèvements au cas où l’un des candidats n’était pas déclaré vainqueur. Par prudence, personne n’a quitté la maison ce jour-là », ajoute une coutière. A ces témoignages un agent municipal témoigne sous anonymat que la ville était restée silencieuse avant de reprendre son aspect normal quelques heures après.
Même prudence à Obala. « Personne ne voulait prendre de risques », se souvient un commerçant avant de poursuivre « aujourd’hui, ça va mieux, mais nous restons attentifs. » Si la peur est retombée, les prix, eux, continuent de s’envoler. Entre Sa’a et Élang, un petit village situé à 14 Km seulement, le voyage en moto coûte désormais le double de ce qu’il valait il y a quelques semaines. « Avant, ce trajet coûtait 1.000 F Cfa, puis il est passé à 1.500 F Cfa quand le prix du carburant a augmenté. Maintenant, certains demandent 3000 F Cfa pour le même trajet », soupire Donatien Manga, planteur.
Une hausse que les conducteurs de mototaxis imputent à la difficulté de se ravitailler. « Dans les stations, les pompistes refusent de nous vendre du carburant dans des bidons. Nous sommes obligés de l’acheter ailleurs et ça nous coûte plus cher », justifie l’un d’eux.
Au marché de Sa’a, de nombreux produits ont aussi connu une hausse. Par exemple, le seau de 5l d’arachide s’achète à 4800 F Cfa au lieu de 4.000 F Cfa il y a quelques jours. La tomate, elle se vend désormais à prix d’or : 7 à 10 petits fruits à 500 F Cfa. « A peine de quoi préparer un repas », se désole une jeune dame. Même le prix de l’huile de palme a augmenté, tandis que le poisson lui, est presque introuvable et la viande de bœuf rare et onéreuse.
Malgré tout, les habitants refusent de céder à la panique. Dans les villages, la vie s’organise entre travaux champêtres et activités commerciales. « Nous voulons juste la paix », lance une quinquagénaire en labourant la terre. « La vie est déjà suffisamment dure ici, alors s’il faut encore courir ou se cacher, il sera impossible pour nous de survivre », renchérit un autre cultivateur.
À la moindre rumeur de tension, les coups de fil s’échangent entre proches. « Que les gens de la ville fassent leur politique et continuent de manger entre eux, nous voulons juste la paix », répète une vendeuse de manioc.
Mélanie Ambombo
Cet article a été produit dans le cadre du projet Partenariat pour l’intégrité de l’information.







