Enseignements secondaires publics : Des milliards collectés…les lacunes persistent
« Serie» (1/5) Au cours de l’année scolaire 2024–2025, le ministère des Enseignements secondaires a collecté plus de 12,5 milliards F Cfa comme frais de scolarité de 1,32 million d’élèves inscrits dans les lycées. Pourtant, les conditions d’apprentissage des élèves sont décriées, dans un contexte où les établissements privés s’imposent.
Selon le ministère des Enseignements secondaires (Minesec), plus de 12,5 milliards de F Cfa ont été collectés comme frais de scolarité au cours de l’année scolaire 2024-2025, correspondant à 1,32 million d’élèves inscrits via des opérateurs électroniques. Et pour l’année en cours, le Minesec prévoit un effectif de près de 2,45 millions d’élèves inscrits dans 5 119 établissements, dont 2 930 publics, encadrés par 101 937 enseignants. Le même montant de frais de scolarité, voire davantage sera collecté. Des dépenses des ménages qui traduiraient leur volonté de maintenir leurs enfants à l’école.
Mais, ces efforts financiers ne parviennent pas à redresser les résultats, qui restent mitigés. Dans les lycées publics du Cameroun, la proportion de redoublants reste préoccupante soit 11,35% en 2024 contre 9, 95% en 2023. Et dans le palmarès des établissements scolaires publiés par l’Office du baccalauréat du Cameroun (Obc), les lycées ferment souvent la marche, loin derrière les collèges privés Libermann, Jean Tabi et François Xavier Vogt.
Des données qui selon Dr Alex Nkoa, spécialiste en sciences de l’éducation, mettent en lumière les limites des conditions d’apprentissage des élèves dans les lycées au Cameroun. Selon ce spécialiste, « le problème réside sur l’usage fait des frais collectés qui vraisemblablement ne profitent pas directement aux conditions d’apprentissage des élèves. » En effet, explique Emanuel Tobie Mbassi Ondoa, secrétaire général de la fédération camerounaise des syndicats de l’éducation (Fecase), « cet argent devrait contribuer à améliorer la qualité de l’éducation. » Mais, dit-il : « C’est le gouvernement qui oriente la destination de ces financements. Pour les frais exigibles, il y a un pourcentage qui va dans les services centraux, un pourcentage pour le fonds de solidarité, un pourcentage pour l’assurance de l’élève, un pourcentage pour les primes de rendement… »
Débrouillardise
Il faut mentionner que les frais exigibles restent inchangés : 7 500 F Cfa pour le premier cycle et 10. 000 F Cfa pour le second cycle de l’enseignement général. Il est évalué à 10.000 F Cfa pour le premier cycle et 15.000 F Cfa pour le second cycle de l’enseignement technique. Des frais auxquels s’ajoutent l’uniforme, les contributions d’Apee et entre autres les fournitures. « Nous payons pourtant tout ça, mais les résultats ont du mal à suivre », déplore Aline Manga, parents d’élèves.
Ces mauvais résultats sont plus visibles en zones rurales où les conditions d’apprentissage s’avèrent particulièrement difficiles : classes surchargées dépassant parfois 100 élèves, pénurie d’enseignants ou enseignants absentéistes, infrastructures scolaires insuffisants ou manque de matériel didactique adéquat.
Derrière cette dégradation du niveau scolaire dans le secondaire public, Louis Marie Kamdem, doctorant en sciences de l’éducation à l’Université de Yaoundé I, y voit, une combinaison de facteurs structurels tels que la dépendance de l’Etat aux financements des ménages pour faire fonctionner les établissements.
A propos, une étude menée en 2020 par le ministère de l’Économie de la planification et de l’aménagement du territoire (Minepat), avec le concours de la Banque mondiale, relève que les dépenses des familles camerounaises pour éduquer les enfants « restent importantes ». Elles représentent 9% des dépenses totales des ménages dans le primaire public, et atteignent 10% dans le secondaire.
Selon Emanuel Tobie Mbassi Ondoa, très peu d’établissements reçoivent la totalité de ce qui leur revient. A cet effet, les établissements publics, peinent à offrir la même qualité de formation que certains établissements privés, ouvrant une brèche à la débrouillardise. « Nos élèves arrivent en classe de Première sans savoir rédiger correctement une dissertation ou résoudre un problème de mathématiques de base », déplore la proviseure d’un lycée de Yaoundé sous anonymat. Chez les élèves, la lassitude s’installe. « Nous travaillons mais souvent sans profs de certaines matières pendant des semaines », décrie Christelle, élève en Première dans un lycée de l’Océan, dans la région du Sud.
Mélanie Ambombo







