Paludisme : la recherche comme arme stratégique de riposte
Alors que cette maladie reste l’une des premières causes de consultation et de mortalité chez les enfants sur le plan national, le pays pour la première fois, consacre à cette pandémie, des journées scientifiques où la recherche est placée au centre de la riposte nationale.
En 2024, selon le ministère de la Santé publique (Minsanté), le paludisme représentait 26,9 % des motifs de consultation dans les formations sanitaires du Cameroun. Chez les enfants de moins de cinq ans, il concentrait 40,6 % des consultations pédiatriques et demeurait responsable de 8,2 % des décès enregistrés.
Des chiffres qui, selon le médecin généraliste Paul Tassé, traduit une urgence sanitaire structurelle. Face à cette urgence sanitaire, le Cameroun organise pour la première fois, et ce depuis le 15 décembre 2025, des Journées scientifiques du Programme national de lutte contre le paludisme (Jspnlp) exclusivement dédiées à cette maladie.
« La lutte contre le paludisme ne peut plus se contenter de solutions uniformes. Elle doit être guidée par des données locales, actualisées et exploitables », explique un épidémiologiste impliqué dans la surveillance des maladies endémiques qui a requis l’anonymat. Il poursuit d’ailleurs que la recherche permet de passer d’une lutte standardisée à une réponse différenciée selon les zones, les saisons et les populations.
Dans un contexte de changement climatique, les experts alertent sur la modification des cycles de transmission, l’extension des zones à risque et l’apparition de résistances aux insecticides. « Les moustiques s’adaptent plus vite que nos réponses. La recherche permet d’anticiper, plutôt que de réagir. Et sans cette veille scientifique, les stratégies perdent progressivement en efficacité », souligne Dr René Mvondo, spécialiste de la lutte antivectorielle.
Le PSNLP 2024–2028 intègre pour la première fois un agenda national de recherche opérationnelle, couvrant la vaccination, la chimioprévention, la prise en charge des cas et les technologies innovantes. Un virage déterminant, soutient Dr Paul Tassé, car la recherche permet d’identifier les interventions et d’orienter les budgets vers celles qui sauvent réellement des vies.
Dans plusieurs pays africains ayant renforcé la recherche comme le Rwanda ou le Ghana, les experts notent une meilleure allocation des ressources et une baisse plus rapide de la morbidité.
Le Cameroun ambitionne désormais de s’inscrire dans cette dynamique, prévient qu’à l’horizon 2030, l’élimination du paludisme au Cameroun passera par un choix rigoureux : faire de la science un pilier permanent de gouvernance sanitaire et non un simple événement ponctuel.
Mélanie Ambombo







