Aide Publique : La France engage 8 milliards de F Cfa dans le secteur de la santé
L’Agence Française de Développement envisage, en partenariat avec les autorités camerounaises et les ONG actives dans le secteur de la santé, de mobiliser ces fonds dans les initiatives de lutte contre le paludisme, la tuberculose et le VIH. Les experts recommandent que cette aide soit accompagnée d’une stratégie claire afin d’éviter un endettement excessif et de garantir une gestion durable des ressources financières.
Le 16 mai 2025, à son siège de Yaoundé, l’Agence Française de Développement (AFD) a présenté son bilan d’activité pour l’année 2024, affirmant jouer un rôle central dans l’accompagnement du Cameroun vers un développement durable, résilient et inclusif.
Parmi les initiatives majeures, le projet du barrage hydroélectrique de Nachtigal, doté d’une capacité de 420 MW, et présenté comme un levier essentiel de transition énergétique bas-carbone. Ce projet doit représenter environ 30 % de la production électrique nationale.
En parallèle, en 2024, l’AFD soutient le programme « Capitales régionales », financé par le Contrat de désendettement et de développement (C2D). Ce dernier vise à moderniser les infrastructures de cinq villes secondaires pour encourager leur croissance économique et renforcer la cohésion sociale. Sur la même période, cette agence a investi 150 millions d’euros (un peu plus de 98 milliards F Cfa) en faveur du programme de lutte contre les inondations des villes de Douala et de Yaoundé (PLIDY).
Cependant, sur le terrain, la portée sociale de ces projets semble souvent mitigée, à en croire certains observateurs. « Ces initiatives accentuent parfois les inégalités spatiales. Les quartiers précaires sont rarement intégrés dans les plans d’aménagement, et les populations vulnérables se retrouvent exclues des bénéfices », souligne Jean-Baptiste Baikanga, urbaniste. Selon lui, la question de l’efficacité réelle des mesures d’inclusion, notamment dans des zones frappées par des inondations récurrentes, comme Yaoundé et Douala se pose.
L’AFD met également en avant la mobilisation des ressources financières et l’appui à l’entrepreneuriat féminin. Toutefois, certains entrepreneurs pointent du doigt un manque de transparence dans l’attribution des fonds. « Les fonds sont souvent captés par des réseaux déjà privilégiés, tandis que les petites entrepreneures peinent à accéder aux crédits », déplore Brenda Bopelet, entrepreneuse.
Par ailleurs, face à l’incertitude née de la suspension des financements américains dans la lutte contre le VIH, la tuberculose et le paludisme au Cameroun, l’AFD envisage de prendre le relais, en partenariat avec les autorités locales et les ONG actives dans le secteur de la santé. En mai 2025 une enveloppe de 8 milliards de F Cfa (environ 12 millions d’euros) est prévue pour appuyer les initiatives de lutte contre ces trois maladies, en collaboration étroite avec le gouvernement camerounais. L’objectif est d’assurer la continuité des services de soins pour les populations les plus vulnérables.
Jules Mballa, expert en gouvernance et développement local, pense que la stabilité politique et la qualité de la gouvernance apparaissent comme des éléments clés du succès de ces projets. « La gouvernance est la clé. Si les institutions ne sont pas solides, même les investissements les mieux conçus risquent d’échouer », insiste-t-il. Selon le Dr Armand Bikeck, si l’engagement de l’AFD témoigne d’une volonté de concilier développement et durabilité, « sans une meilleure inclusion des populations locales et une véritable concertation sur les priorités nationales, ces projets risquent de rester des succès techniques mais des échecs sociaux », souligne le Dr Armand Bikeck.
Hyacinthe TEINTANGUE (stagiaire)







