Covid-19 /Interview
Nga Onana Sylvain - Pdt Syndicat

Sylvain Nga Onana: « Certainement après la victoire, le gouvernement apportera dans les meilleurs délais des réponses positives et pertinentes à la crise des hôpitaux et des personnels de santé ».

Le Président National du Syndicat National des Personnels des Établissements et Entreprises du Secteur de la Santé du Cameroun (CAP/SANTÉ) parle dans cet entretien des conditions de travail du corps médical pendant cette période de crise sanitaire.

Le Cameroun fait face en ce moment à une pandémie du Covid-19. Comment le personnel médical vit cette période inédite ?

Le personnel de santé vit cette période inédite avec peur, anxiété à cause de l’impréparation, de non capacitation (mise à niveau) des personnels de santé, sous-effectif qualitatif et quantitatif du personnel, manque de moyens techniques et logistiques susceptibles de faire front efficacement contre la pandémie d’une part, mais aussi avec courage, professionnalisme par rapport à nos différents serments.

Est-ce que le personnel est assez outillé pour affronter cette pandémie ?

Le personnel pour le moment n’est pas encore assez outillé pour combattre cette pandémie.  Nous faisons avec ce que nous avons sous la main, nous sommes en guerre contre le Covid-19 et nous essayons de nous adapter pour vaincre cette pandémie.

Avez-vous déjà eu à gérer une crise de cette envergure ?

Pour le moment, à ma connaissance pas encore.

Le  Syndicat national des personnels médico-sanitaires du Cameroun (SYNPEMS) et  le Syndicat National des Personnels des Établissements et Entreprises du Secteur de la Santé du Cameroun (CAP/SANTÉ) revendiquent  régulièrement les meilleures conditions de travail.  Quelle est la situation actuellement avec la crise, faut-il craindre le pire ?

Les conditions de travail des personnels de santé divergent, selon qu’ on soit dans les grandes zones urbaines Douala, Yaoundé, Bafoussam, Buea,  Limbe, où les conditions de travail seraient acceptables, mise à disposition de quelques équipements (masques, gants de soins, bottes, sur blouses, eau courante plus savon, solution alcoolique, thermoflash, tests de dépistage, lits d’hospitalisation, respirateurs, oxygenateurs); par rapport à l’autre partie du pays où on pratiquerait avec les moyens de bord, car il manquerait pratiquement de tout). En plus avec cette pandémie de covid-19 la motivation n’y est toujours pas. En termes de risque, le personnel de santé est le plus susceptible de contracter la maladie étant en contact permanent avec les populations infectées et à risque, dans la mesure où certains équipements de protection ne seraient pas disponibles. Les personnels ayant été en contact avec les malades sont mis en quarantaine par leurs responsables, d’autres sont victimes de stigmatisation dans leurs familles. Nous avons par exemple, une soignante d’une formation sanitaire publique de Yaoundé qui s’est faite renvoyer par son mari parce que mise en quarantaine. Toutefois, anxiété, peur, mais détermination et professionnalisme pour barrer la route au Covid-19.

Les conditions de travail ne sont pas les meilleurs pour le moment, malgré des cas de contamination, de confinement et même de décès de certains personnels hospitaliers, l’heure est au combat acharné contre ce virus. Certainement après la victoire, le gouvernement apportera dans les meilleurs délais des réponses positives et pertinentes à la crise des hôpitaux et des personnels de santé.

Le déficit du personnel soignant dans les établissements hospitaliers, a toujours été décrié, mais sans solution concrète de la part du gouvernement. Le Minsante dans le cadre de cette crise procède à un recrutement afin de renforcer le corps médical. Quelle est l’analyse que vous faites de cette démarche ? Ces nouvelles recrues auront-elles la compétence requise pour affronter cette épreuve ?

La mobilisation est générale dans la mesure où le gouvernement pour essayer de réduire le sous-effectif des personnels dans les formations sanitaires, a fait appel aux nouvelles recrues n’ayant ni poste de travail ni salaire. Les personnels de par leur professionnalisme en respectant l’éthique et la déontologie de chaque corps sont dévoués à la tâche malgré le manque criard de plateau technique. Manque de laboratoires cliniques et d’imagerie médicale dédiés. Nous espérons qu’après la fin du Covid-19, l’État prendra toutes les dispositions pour répondre aux différentes préoccupations des personnels de santé du Cameroun à fin que notre pays soit désormais paré pour répondre à ce genre de pandémie, au lieu de la subir avec toutes les conséquences négatives qu’elle cause sur la vie des populations. Le MINSANTE fait ce qu’il peut en mobilisant les dernières recrues non encore affectées, sans salaire, certes formées et n’ayant pas une expérience rompue pour ce genre d’épreuve, et des temporaires, des saisonniers, des bénévoles sans matricules, sans salaires, sans droit à pension puisque n’étant pas inscrits à la CNPS (exploitation des personnels fragiles sortis des écoles de formation).

A votre avis, quelles sont les mesures qui pourront être prises pour une meilleure sécurité et encadrement des professionnels de santé pendant et après la crise ?

Les mesures qui devraient être prises pour une meilleure sécurité et un épanouissement des professionnels de santé seraient : *Un plan massif de recrutement des personnels de santé de 1000 professionnels tous corps confondus/an pendant 10ans au moins, pour pallier le déficit d’effectifs quantitatifs et qualitatifs dans nos formations sanitaires publiques ; *Harmoniser l’âge de départ à la retraite pour tous à 65 ans, car ces personnels vont très tôt à la retraite, 50-55 ans quand ils ont déjà acquis de l’expérience et seraient encore capables d’apporter davantage pour le bien des malades. Certains se retrouvent recruter à l’étranger au détriment  de notre pays ; *Mettre à jour les différents plateaux techniques des hôpitaux ; *Réduire au stricte minimum les évacuations sanitaires à l’étranger ; *Doter le MINSANTE d’au moins 20% de l’enveloppe budgétaire de l’État afin de se consacrer à la prise en charge et prévention de la maladie ;  *Faire les états généraux de la santé publique au Cameroun afin d’harmoniser les protocoles de soins, la tarification des prestations, d’éviter les ruptures de médicaments, d’intrants hospitaliers, de respect des textes (quote-part, primes, motivations, nouveaux corps de métiers).

Quel message pouvez-vous transmettre à vos collègues en cette période de crise ?

En cette période de crise je demanderais aux personnels de rester professionnels dans leur travail, de respecter les mesures barrières édictées par l’OMS et le Gouvernement de la République, de se protéger autant faire que ce peut, sensibiliser, éduquer, communiquer tout autour de nous afin de vaincre dans les plus brefs délais cette pandémie. Chers professionnels de la Santé, soldat contre Coronavirus-19, vous avez tout notre respect et tout notre soutien, nous ne vous abandonneront jamais.

Entretien avec M.L.M

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