Le Dr Armand P. Kalefack, médecin du travail, apporte des clarifications sur l’Érythème fessier, une pathologie cutanée connue sous le nom de « rouges fesses » au Cameroun.

Qu’est-ce qui peut expliquer le phénomène de « rouge fesse » chez les enfants ?

Il y a beaucoup d’idées préconçues dans cette pathologie qu’on appelle « les rouges fesses ». Pour être correcte, ça s’appelle l’Érythème fessier. En soi, ça n’a rien à voir avec tout ce qu’on peut entendre tout autour. En fait, l’Érythème fessier c’est juste une apparition des plaques rouges au niveau des fesses du bébé. Par rapport à hier, peut-être qu’on en avait moins. Les parents utilisaient plus les couches en tissus qui ont l’avantage de laisser passer de l’air qui aère un peu plus les fesses. Aujourd’hui, on développe des couches dites super absorbantes qu’on laisse durer plus longtemps chez les enfants. Donc tous ces facteurs-là peuvent être mises sous le compte de l’incidence actuellement très élevée.

L’Érythème fessier est-il une maladie ?                              

L’Érythème fessier est une réaction liée à un contact. On peut considérer cela comme une maladie dans la mesure où ça s’écarte de la norme. Mais je ne vais pas vraiment dire que c’est une maladie, mais plutôt une réaction bénigne (pas grave, sans danger). Normalement en appliquant quelques crèmes ou quelques pommades pour la plupart de cas, c’est résolu. Il peut se surinfecter et devenir ce qu’on appelle impétigo (infection de la peau très contagieuse, généralement pas grave) si un champignon ou une bactérie se fixe dessus.  En ce moment-là, il faut un traitement plus adéquat et là, je peux dire oui, on est désormais dans une maladie.

Quels sont les facteurs qui contribuent au développement de l’érythème fessier chez les enfants ?

L’Érythème fessier est tout simplement lié au fait qu’on ait fait porter des couches à un enfant pendant longtemps. Le fait qu’on ne l’ait pas changé ou humidité quand il a fait pipi plusieurs fois. Parfois c’est simplement lié à certains produits qu’on utilise pour laver les couches ou soit le fait qu’on ne les lave pas correctement.

Comme autres, facteurs, on peut citer la qualité des couches. Sur le marché, il y a des couches pour toutes les bourses, mais qui ne sont pas toujours de bonne qualité.  Beaucoup de couches sont d’origine douteuse. On y trouve parfois beaucoup de substances qui ne sont pas appropriées, alors que les enfants sont assez sensibles. Il y a aussi des médicaments. Certains antibiotiques peuvent réagir par un érythème fessier.

Cette situation est-elle la même dans toutes les régions ?

Pour avoir l’Érythème fessier, il faut qu’il ait un contact, une certaine chaleur, car c’est tout cela qui donne une inflammation, une rougeur. Naturellement, dans les zones les plus chaudes on aura tendance à avoir plus de cas d’érythème fessier que dans les zones les plus froides. La situation varie naturellement en fonction des zones et aussi des saisons.

Dans l’entendement populaire, l’Érythème fessier se développe dans le corps dans l’enfant et ne se soigne pas à l’hôpital.  Que dites-vous à ce sujet ?  

Non, c’est n’est pas à l’intérieur. L’Érythème fessier n’est qu’une manifestation externe d’une irritation. Ça se soigne en médecine moderne. Il y a des pommades pour le traitement. J’ai vu des parents qui arrivent à l’hôpital et disent qu’ils constatent qu’il y a des choses comme des cordes dans les selles de leur bébé. Pour eux, il s’agit d’une manifestation intérieure des « rouges fesses ». Non, pour dire rouges fesses, il faut qu’il y ait l’Érythème. Les selles des enfants sont naturellement un peu jaunâtres, contenant des choses comme des fils. C’est normal, ce n’est pas la maladie.

La médecine traditionnelle est-elle recommandée pour le traitement ?

Il y a de très belles choses qui se font dans la médecine traditionnelle, mais je ne vais pas entrer dans le domaine que je ne maîtrise pas. Je préfère recommander l’utilisation des options thérapeutiques que je connais. Car elles sont mesurables, quantifiables dont on peut prédire l’évolution. La médecine traditionnelle reste certes une alternative très intéressante, mais disons attention à ce qu’on utilise, surtout chez les enfants, car ils sont assez fragiles.

Quelle est la tranche d’âge la plus exposée à l’Érythème fessier ?

Cela va de soi, mais c’est assez évident qu’on va trouver cela chez les nourrissons et les enfants de moins de 3 ans, parce que c’est la tranche d’âge où ils portent encore les couches. Cependant, l’Erythème sera plus fréquent chez les nouveaux nés, c’est-à-dire de 0 à 28 jours.  Après cet intervalle, on va encore pousser jusqu’à 4 ou 6 mois. Mais après cette tranche, on a une incidence qui baisse parce que non seulement l’enfant acquiert une certaine aptitude, mais il porte aussi de moins en moins les couches. Plus l’enfant va grandir en âge, moins il présentera le tableau d’érythème fessier.

Que recommandez-vous aux parents pour éviter l’Érythème fessier ?

Il faut changer régulièrement les couches, ne plus laisser l’enfant longtemps dans ses selles ou ses urines. Il faut laver les couches attentivement, les rincer correctement et faire attention aux produits qu’on choisit. Pour les laver, de préférence, utiliser les produits hypoallergéniques (qui provoquent peu de réactions allergiques, Ndlr).

Que dire sur l’incidence d’enfants atteints par l’Érythème fessier au Cameroun ?

Forcément il y a des études qui vont aller dans ce sens-là, mais peut-être pas actualisées. Vu la tendance actuelle chez les enfants, on a des incidences qui sont assez fortes et assez récurrentes. Il est presque normal de constater chez chaque parent que son enfant a au moins une fois un Érythème fessier, ce qui fait qu’on se retrouve actuellement sur une pathologie qui est quasiment chez tous les enfants.

Interview réalisée par Hyacinthe TEINTANGUE (stagiaire)