Extrême-Nord : La campagne sanitaire ne fait pas l’unanimité
Organisée gratuitement par l’élite locale, des voix s’élèvent pour dénoncer l’incapacité de l’Etat à garantir un accès durable aux soins de santé aux populations de cette région.
Malgré la chaleur qu’il fait ce 25 juin 2025 à Mora, Miriam 62 ans, attend patiemment son tour. Après sept ans de lutte contre la cataracte, cette artisane a abandonné son activité pour bénéficier des soins gratuits offerts à la population de l’Extrême-Nord. Elle fait partie des 208 cas de cataracte prise en charge ce jour.
Ces opérations de la cataracte sont l’un des soins apportés aux populations dans le cadre de la « Promotion Santé 2025 », une initiative de l’élite camerounaise visant à prendre en charge la santé des populations, notamment dans les zones reculées et défavorisées. Cette approche inclusive a permis de mobiliser efficacement les ressources humaines, matérielles et financières nécessaires à la réussite de cette opération.
Conduite par le ministre de la Santé publique, cette campagne qui vise le bien-être des populations, a été effectuée dans les départements du Mayo-Tsanaga et du Mayo-Sava, au cœur de l’Extrême-Nord. Au cours de cette opération, un échographe portable a été offert à l’Hôpital de district de Mokolo II, à l’Hôpital régional annexe de Mokolo, au Centre de Santé Intégré de Ziling, et à l’Hôpital de district de Mora. Pour la seule journée du 25 juin 2025 à l’Hôpital régional de Mokolo, 73 cas de fistules ont été dépistés et pris en charge, 155 cas de cataractes identifiés et traités, 55 interventions chirurgicales réalisées.
Des actions diversement appréciées par la population. « Les populations n’ont pas besoin de campagne gratuite pour se soigner. La région de l’Extrême-Nord Cameroun est abandonnée à elle-même. Cette initiative portée par l’élite locale vient transformer le droit fondamental qu’est l’accès aux soins en une aumône. Et si les chiffres mis en avant semblent spectaculaires, ils dévoilent la faiblesse du système sanitaire camerounais », lance un habitant qui a requis l’anonymat. Un ressortissant de cette région ajoute : « Bien que médiatisée comme une aide humanitaire, cette campagne qui cache mal l’intention politique de ces initiateurs révèle l’incapacité de l’Etat à garantir un accès pérenne aux soins sanitaires à ses populations ».
A en croire l’agent humanitaire, Audrey Ndomo, cette région du pays vit des réalités qui rendent illusoires une couverture sanitaire par des campagnes ponctuelles. « Il y a entre autres l’insécurité chronique, les catastrophes naturelles récurrentes et la mal gouvernance », analyse Audrey Ndomo. Selon elle, pour le développement structurel et durable de cette région, il faut un financement pérenne et transparent avec entre autres, l’adoption des technologies adaptées aux réalités locales.
Mélanie Ambombo







