Maladies cardiovasculaires : 30 % de décès enregistrés chaque année au Cameroun
Avec une prévalence de 30 % de décès par an au Cameroun, les maladies cardiovasculaires constituent la deuxième cause de mortalité après les maladies infectieuses. Toutefois, elles restent encore méconnues du grand public, malgré le fait que 80 % des facteurs de risque sont évitables.
Beignets-bouillie-haricots, c’est le repas populaire et abordable qui permet chaque matin à des milliers de Camerounais de se remplir le ventre à moindre coût au « beignetariat » du coin. Mais pour les médecins, ce petit-déjeuner est une véritable bombe à retardement car, disent-ils, il est trop gras, trop salé et trop sucré. Et ce n’est pas la seule habitude préoccupante, de plus en plus, les boissons gazeuses ont remplacé l’eau dans les foyers, exposant les populations aux maladies cardiovasculaires.
Au quartier Yassa, à Douala, Annette Olive Bidima, tenancière d’un tournedos, en paie les frais : « un matin, mon mari Jean Calvin s’est effondré aux toilettes, c’est à l’hôpital que le médecin nous a dit qu’il avait fait un Avc. Depuis il ne sort plus et c’est à moi que revient sa prise en charge médicale et celle de nos six enfants ». La commerçante à bout de force et de moyens financiers poursuit, « nous sommes pauvres, sans vraiment d’argent pour nous nourrir convenablement. J’ignore d’où mon mari a pris cette maladie des riches. »
Selon des experts réunis le 24 septembre 2025 au symposium organisé par la Fondation Cœur et Vie et la Société Camerounaise de Cardiologie, sous le patronage de l’Hôpital Laquintinie de Douala, les maladies cardiovasculaires représentent 30% de l’ensemble des décès enregistrés chaque année au Cameroun. Et pourtant, « les facteurs de risque qui concourent à cette maladie sont évitables à 80 % », rappelle le Dr. Marie Solange Ndom, cardiologue et Directeur Général de l’Hôpital Laquintinie de Douala.
Selon le Pr. Félicité Kamdem, cardiologue et présidente de la Société Camerounaise de la Cardiologie, cette pathologie affecte le cœur ou les vaisseaux sanguins. Cette première femme professeur en cardiologie au Cameroun, insiste sur le fait qu’avec la transition épidémiologique et le changement de mode de vie, cette maladie est en évolution au Cameroun. De ce fait, dit-elle, la prévention doit commencer dès l’enfance et se poursuivre à l’âge adulte. Soit en adoptant un mode de vie sain, en évitant la sédentarité et en pratiquant une activité physique régulière.
« Un enfant qui grandit avec des sodas, des sucreries, fritures et sans activités physiques, est un adulte prédisposé au diabète, à l’hypertension artérielle et à l’obésité », avertit la coache alimentaire Vanelle Kamga. Ces maladies combinées à d’autres facteurs tels l’excès de cholestérol, le tabagisme…, relève le Pr Félicité Kamdem, exposent aux maladies cardiovasculaires.
Par ailleurs, déplore Dr Armel Djoumou, cardiologue et président de la Fondation Cœur et Vie, l’accès limité aux soins constitue un défi majeur. La répartition des centres de soins pour les maladies cardiovasculaires n’est pas équitable dans les 10 régions du Cameroun, limitant la prise en charge précoce des patients. Il ajoute « qu’au Cameroun, la prise en charge des maladies cardiovasculaires est très coûteuse, et nous n’avons pas toujours les moyens de nous offrir des soins adaptés. En revanche, nous avons au moins la capacité de prévenir cette maladie grâce à des mesures simples qu’il faut respecter. »
« Il faut réapprendre à manger sain » insiste Vanelle Kamga en recommandant la consommation des légumes et fruits vendus dans les marchés locaux telle la papaye, le corossol et l’ananas. Elle conseille également de réduire la consommation du sel et du sucre, d’éviter les cubes d’assaisonnement, de réduire les fritures et la consommation de l’excès d’huile rouge, de boire de l’eau plutôt des sodas, de bouger chaque jour, de contrôler régulièrement sa tension, son cholestérol et son taux de glycémie. « Il faut privilégier les feuilles de manioc, les feuilles de morelle noire, le Ndolé, le Eru à condition de les cuisiner en modérant l’huile et la viande », préconise-t-elle.
Hyacinthe TEINTANGUE (stagiaire)







