Présidentielle 2025 : Comment les candidats gèrent l’après scrutin

Plus d’une semaine après la tenue de l’élection présidentielle, les 12 candidats à la course ont une communication contrastée. Entre l’auto proclamation d’Issa Tchiroma Bakary et le calme de plusieurs présidentiables, les attitudes ne sont pas les mêmes. Des postures que des politologues trouvent stratégiques.

 De tous les 12 candidats à l’élection présidentielle du 12 octobre 2025, Issa Tchiroma Bakary, est celui qui aura le plus fait parler de lui après le scrutin. Depuis Garoua son fief politique, ce président et candidat du Front pour le salut national du Cameroun (Fsnc) s’est autoproclamé vainqueur un jour à peine après la fermeture des bureaux de vote.

Dans une série de vidéos publiées sur Facebook, accompagnées de communiqués largement relayés sur la toile, l’ancien ministre de l’Emploi et de la Formation professionnelle (Minfopra), ne cesse d’appeler Paul Biya, au pouvoir depuis 43 ans, à « reconnaître sa défaite ».

Dénonçant une falsification massive des suffrages, le ministre sorti du gouvernement le 24 juin 2025 se présente en porte-voix du peuple.  Dans un ton combatif, il assure : « le peuple ne se laissera pas faire. Le peuple est déterminé à se battre face à un régime (…) ce peuple qui retrouvé dos au mur, n’aura pas de choix que de prendre son destin en mains et d’aller chercher cette victoire partout où elle se trouve. »

Cette communication offensive saluée par ses partisans et tous les adeptes du changement a aussitôt provoqué une musclée riposte du régime en place. Comme à son habitude, Paul Biya n’a pas dit mot, laissant ses ministres se charger de cet « ancien allié ». Les plus en vue sont le ministre Paul Atanga Nji Ministre de l’Administration territoriale et de l’Aménagement du territoire, Jacques Fame Ndongo, ministre de l’Enseignement supérieur, Grégoire Owona,  ministre du Travail et Sécurité sociale, Jean de Dieu Momo ministre délégué à la Justice, qui dans une communication défensive, multiplient intimidations, railleries et tentatives d’apaisement.

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Pour Vincent Mfomo, doctorant en sciences politiques à l’Université de Yaoundé II, cette posture du camp présidentiel « illustre la volonté du pouvoir de ne jamais affronter directement des opposants mais de laisser des figures du régime s’en charger. Une démarche qui tend à montrer que le président de la République n’est pas leur égal. »

Discrétion

Mais si le candidat du Fsnc occupe la scène politique, la majorité de ses concurrents ont choisi la tempérance. Dans un ton plus modéré, Patricia Tomaino Ndam Njoya, de l’Union démocratique du Cameroun (Udc), réclamant des élections transparentes et honnêtes pour les populations, a saisi le Conseil constitutionnel. Pierre Kwemo, de l’Union des mouvements socialistes (Ums) a dénoncé une élection entachée de fraudes graves, tandis que Serge Espoir Matomba du Peuple uni pour la rénovation sociale (Purs), a lancé un appel à la patience et au calme en attendant la proclamation officielle des résultats par les instances compétentes.  Jacques Bougha du Mouvement citoyen national camerounais (Mcnc) et Ateki Seta Caxton du Parti de l’alliance libérale (Pal), ont salué le processus électoral tout en appelant les citoyens au calme. Ateki dans l’une de ses rares sorties est même allé jusqu’à féliciter « Tchiroma pour ce moment décisif ».

Sur les réseaux sociaux, Hiram Iyodi, le benjamin de la course, a invité Paul Biya à « entrer par la grande porte de l’Histoire » en facilitant une alternance pacifique et en respectant la volonté populaire. Arrivé en troisième position en 2018, Cabral Libii au vu des sondages a admis sa défaite au lendemain du scrutin, avant de se recentrer sur la vie interne de son parti.  Le président du Parti camerounais pour la réconciliation nationale (Pcrn), depuis, reste peu disert sur le scrutin du 12 octobre 2025, privilégiant un discours mesuré. Bello Bouba Maigari, est lui aussi discret depuis la fin du scrutin.

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Vincent Mfomo, voit en cette retenue de la plupart des candidats, une inexpérience politique car dit-il : « beaucoup sont entrés en politique par l’élection présidentielle sans un réel ancrage local ou militant. Leur silence peut être considéré comme une phase d’observation avant un probable repositionnement. » Également doctorante en sciences politiques, Madeleine Mengue voit en ce silence une stratégie : « dans un contexte tendu, parler peut couter cher. En période post-électorale, la communication politique des candidats doit pouvoir contenir crédibilité et survie politique. »

Mélanie Ambombo

Cet article a été produit dans le cadre du projet Partenariat pour l’intégrité de l’information.

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