Présidentielle 2025 : La timide campagne dans les régions anglophones
Onze jours après le lancement de la campagne électorale, plusieurs candidats ne se sont pas encore rendus dans ces deux régions anglophones. Le mot d’ordre de ville-mortes imposé par les sécessionnistes cristallise le déploiement des candidats dans cette partie du pays.
A quatre jours de la fin de la campagne électorale pour l’élection présidentielle du dimanche, 12 octobre 2025, seuls quatre des onze candidats de l’opposition se sont jusqu’ici rendus dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest pour battre campagne. Les meetings tenus par Joshua Osih, Bello Bouba Maigari, Cabral Libii et Issa Tchiroma Bakary se sont limités à un défilé motorisé de l’entrée de la ville, jusqu’au centre-ville de Bamenda ou les candidats ont ensuite échangé avec les populations.
Certains, a l’instar de Cabral Libii, candidat du Parti Camerounais pour la Réconciliation Nationale (Pcrn) ont été accompagnés d’une escouade des Forces de défense et de sécurité (Fds) pour parer à toute éventualité en cas d’attaque sécessionniste.
Une fois ces candidats partis, plus rien ou presque. La ville, sur laquelle plane un mot d’ordre de ville morte imposé par les sécessionnistes depuis début septembre, jusqu’au lendemain du 12 octobre, retrouve son calme habituel. Outre les affiches du candidat du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc), et quelques rencontres organisées par les militants de ce parti, les populations disent ne pas vivre l’euphorie de la campagne observée dans d’autres villes du pays.
« C’est seulement au centre-ville de Bamenda qu’il y a un peu d’ambiance quand ces candidats viennent. Dans les quartiers reculés, tout est calme. La vie est au ralenti. On vit avec la peur. Les sécessionnistes ont imposé les villes mortes et ce n’est qu’après l’élection qu’elles prendront fin », renseigne Franklin, habitant de Bamenda. A Buea, la situation n’est pas différente. « On ne ressent pas l’ambiance de la campagne et on ne pourra pas voter à cause des sécessionnistes », déplore Florence, habitante de Buea.
Ghost town
L’insécurité est à l’origine du faible déploiement des candidats dans ces régions, même s’ils ne l’avouent pas. Au sein de l’équipe de campagne du candidat Serge Espoir Matomba, on tente de justifier l’absence du Purs dans ces régions. « On ne peut pas être partout. Nous avons noué des alliances avec des partis alliés. Et l’un de ces partis bat campagne pour nous dans ces régions », indique-t-il sans pouvoir donner le nom dudit parti. Du côté du candidat Pierre Nkwemo de l’Umc, on évoque tout simplement « des contraintes de calendrier ». Sans plus.
Ces « ghost town » ne seront pas sans conséquence sur le scrutin dans ces deux régions. Les populations craignent de sortir de leurs maisons. Ce qui fait dire à Aristide Mono, analyste politique, que « c’est l’un des dilemmes auxquels font face les autorités en charge de l’organisation des élections et aussi les acteurs du processus électoral. Cette insécurité offre des taux d’abstention très élevés et des taux de participation très faibles. Ce qui décrédibilise l’élection et porte atteinte à la légitimité des élus », analyse-t-il.
A en croire le coordonateur de Un monde à venir, « le risque sera plus grand le jour du scrutin. C’est pourquoi à la dernière élection, on avait appliqué un système non prévu par la loi, qui consistait à regrouper les urnes dans un même endroit pour que les gens n’aient pas à parcourir de longues distances pour aller dans les bureaux de vote et accroître le risque de se faire attaquer », renseigne Philippe Nanga d’après qui, les votes enregistrés dans ces deux régions sont généralement ceux des Fds et des fonctionnaires.
Blaise Djouokep
Cet article a été produit dans le cadre du projet Partenariat pour l’intégrité de l’information.







