Présidentielle 2025 : les écoles restées vident à Yaoundé
La capitale politique s’est refermée sur elle-même à la veille et au lendemain de la proclamation des résultats. Dans les quartiers, les parents ont préféré jouer la carte de la prudence, transformant les écoles en lieux silencieux et déserts.
Depuis plusieurs jours, Yaoundé vivait au rythme des rumeurs. Dans les marchés, les taxis ou les salons de coiffure, la date du jeudi 23 octobre revenait en boucle. C’est ce jour-là, affirmait-on, que le Conseil constitutionnel allait proclamer les résultats de l’élection présidentielle. Personne ne savait d’où venait l’information, mais tout le monde y croyait. Peu à peu la tension s’est installée et la psychose a pris les menages en otage.
Dès jeudi, certains parents ont pris les devants. « Il nous a été dit que les résultats tomberaient ce jour-là, alors j’ai préféré garder mes enfants à la maison », confie une mère rencontrée à Nkolndongo, dans l’arrondissement de Yaoundé 4e. D’autres ont été plus radicaux : « mes deux filles sont parties chez leurs grands-parents à Obala depuis vendredi. On attend que tout se calme avant qu’elles ne reviennent », témoigne un père habitant du même quartier.
Dans les groupes WhatsApp de parents d’élèves, les messages se sont multipliés : « Ne laissez pas les enfants sortir lundi. » Le mot d’ordre s’est propagé, sans aucune note officielle.
Le lundi 27 octobre 2025, jour de proclamation des résultats, dans les quartiers Anguissa, nkomo Ekounou, ou encore Biteng et Essomba, les écoles sont restées fermées. Sur la route pas l’ombre d’un enfant en uniforme scolaire, dans les écoles, les cours d’ordinaire pleines de cris et de jeux, sont restées vides. Portails verrouillés, cours désertes, silence inhabituel. À Mvog-Ada, quelques élèves venus sans information ont trouvé porte close. Même scène aux quartiers Essos et Nkolndongo. Au petit matin, la ville s’est réveillée dans le calme absolu. Boutiques et échoppes fermées, étals vides, rues désertes.
Dans plusieurs établissements, les décisions ont été prises dès dimanche soir. « Nous craignions des débordements et nous avons choisi de protéger les enfants », justifie un proviseur. Les enseignants eux-mêmes ont été invités à rester chez eux. Et quand bien même certains établissements ont tenté d’ouvrir, les salles de classe étaient presque vides. « Sur 45 élèves, seuls 10 sont venus. Les parents ne veulent pas prendre de risque », raconte un enseignant à Mvog Ada.
Le soir de la proclamation, le président Paul Biya a été confirmé pour un huitième mandat avec 53,66 % des voix. Une annonce accueillie dans un silence pesant. Pas de klaxons, pas de liesse, pas de slogans. Juste une capitale immobile, méfiante, épuisée. Et le lendemain, le calme a repris.
Mélanie Ambombo
Cet article a été produit dans le cadre du projet Partenariat pour l’intégrité de l’information.







