Agriculture : Le mauvais état des routes paralyse les producteurs de Makénéné
Une plantation de Cacao à Makénéné

C’est l’une des principales difficultés à laquelle sont confrontés ces hommes et femmes qui se sont tournés vers le travail de la terre dans cette localité du département du Mbam et Inoubou dans la région du Centre.

Vêtue d’une robe fleurie et d’un pantalon jean bleu tous deux tachetés de poussière, des sandales aux pieds, Brigitte Matho vient de regagner son domicile après plusieurs heures passées au champ. Assise sur un banc devant l’entrée principale de sa maison, la jeune dame raconte avec passion, le pourquoi de sa venue et de son installation à Makénéné. Arrivés dans cette Commune située dans le département du Mbam et Inoubou dans la région du Centre il y a environ 4 ans, après la recherche infructueuse d’emploi à Douala, son feu mari et elle, décident de se lancer dans l’agriculture. Cette mère de 2 enfants a fait de la culture du maïs et du plantain sa spécialité. Les bénéfices qui découlent de la vente permettent à cette originaire de Mbouda dans le département des Bamboutos région de l’Ouest Cameroun, de s’occuper de sa petite famille malgré la disparition de son mari. « Makénéné accueille tout le monde. C’est un village qui ne déçoit pas quand tu fais le champ », clame celle qui a fait de Makénéné son village, sans en dire plus. Même son de cloche du côté de Jacob Kougoum, ex commerçant à Douala. Après son installation dans cette Commune, le quinquagénaire va exercer comme chauffeur de mototaxi, avant de se lancer dans la culture du riz Nerica 3. Dont il entend par ailleurs rehausser la production à Makénéné, à travers diverses actions dont l’encadrement des jeunes intéressés (au nombre de 18 aujourd’hui, Ndlr) par la culture de cette céréale.

Coût du transport

Seulement, malgré l’engouement et les bénéfices que tirent Jacob et Brigitte des champs, l’écoulement de leurs produits sur le marché local reste une vraie gageure. Idem pour les autres producteurs. Pour cause, le mauvais état des routes rend difficile la sortie des cultures des plantations. « On a des plantations où pour qu’un sac de cacao arrive en ville, il faut payer 8 000 F Cfa, voire 10 000 F Cfa pour les champs situés à plus de 4 heures de la route », révèle Gery Ndemi, cacaoculteur. Comme lui, Patrice Deuga affirme que le mauvais état des routes rend onéreux le prix du transport. Un prix qui s’élève parfois à 2 000 F Cfa la motocyclette, pour le sac de 100 kgs. A noter qu’une moto est capable de faire 25 tours environ, en période de grande production (Novembre-Décembre). « Mon champ n’étant pas à côté, je paie 3 000 F Cfa pour le sac de 100 kgs. Mais il y en a qui paient 10 000 F Cfa le sac.

C’est le cas de ceux qui sont à Ndiki (autre commune située dans le département du Mbam et Inoubou, région du Centre). D’où l’importance d’avoir sa propre moto », renseigne le cacaoculteur. Qui ajoute que le coût du transport par camion est beaucoup plus important, d’où le choix de la plupart des producteurs, d’opter pour la motocyclette. Les producteurs des diverses autres cultures ne sont pas mieux lotis. Le cas de Muma Lum, productrice de pastèques, qui révèle que le prix du transport (petite voiture) de sa plantation pour le marché est de 20 000 F Cfa. « Quand c’est le pick-up, c’est à partir de 30 000 F Cfa », ajoute-t-elle. A côté du problème de transport, il y en a d’autres non négligeables. Notamment les difficultés d’accès aux financements, la main d’œuvre, et le travail qui jusqu’ici, est artisanal.

Une plantation de Cacao à Makénéné

Production

D’où la difficulté à satisfaire la clientèle constituée pour la plupart des Groupes d’initiatives communes (Gic) et des revendeurs, plus connus sous le nom de « Bayam-sellam ». A ces difficultés, s’ajoutent celles occasionnées par les animaux ravageurs qui, à en croire certains riziculteurs, ont beaucoup favorisé la baisse du rendement. Pour preuve, sur une superficie de 2 300 m2, Jacob ainsi que les membres du Gic auquel il appartient, n’ont pu obtenir qu’une production de 280 Kg de riz au lieu des 350 Kg dont ils projetaient au départ. Soit une baisse de 70 kg par rapport aux prévisions. Qui, comme aux récoltes de l’année dernière, ont été vouées à l’échec. « Nous avons eu 1 tonne 200 kilogrammes sur l’hectare exploité, alors qu’on s’attendait à 3 tonnes », souligne Jacob Kougoum. 

Aux vues de ces difficultés, le riziculteur souhaite avoir l’appui du gouvernement pour une plus grande production. Afin d’avoir « un système de mécanisation, avec des tracteurs qui vont semer et récolter le riz. Et nous, on va s’organiser pour monter la garde, car tant qu’il y a production, il y a vente », désire-t-il. Contrairement à lui, Patrice Deuga dont les dépenses liées au transport et à l’entretien du champ s’évaluent à 300 000 F Cfa l’année cacaoyère, n’espère plus en l’Etat. Mais se contente de ses ventes qui se font lors de la période consacrée à l’ouverture de débat. Et peu importe le prix qui sera fixé, la fédération (qui coiffe les Gics), les Gics et même les cacaoculteurs trouvent leurs comptes. « Au final, tu peux avoir quatre fois la somme que tu as dépensé pour l’entretien », révèle le cacaoculteur.

Michèle EBONGUE, de retour de Makénéné

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