Nord : Les lions menacés de disparition dans le complexe de la Bénoué

La population de cette espèce est en nette régression et les chercheurs parlent d’une possible disparition dans les années à venir au Cameroun. Ces félins se trouvent dans deux unités de conservation : le complexe de la Bénoué et le parc national de Waza.

Le lion est une espèce dotée de valeurs emblématiques, charismatiques et culturelles. Dans le complexe de la Bénoué, cette espèce qui constitue un attrait touristique présente des signes de diminution depuis un certain temps. C’est un constat qui découle des travaux des chercheurs et experts de la faune. A l’instar de Hans Bauer, professeur à l’université d’Oxford en Angleterre, chercheur en écologie et en conservation du lion. « Je dispose de quelques années d’expérience en Afrique francophone. Nous avons constaté que le lion est menacé de disparition dans la sous-région Afrique centrale. Le nombre a beaucoup diminué ces dernières années. Environ la moitié de cette espèce a d’ailleurs disparu », affirme-t-il.  Il relève qu’au Cameroun, on a encore une population assez nombreuse des lions qui se trouvent dans le complexe de la Bénoué. Ce complexe est situé dans la région du Nord et est constitué de trois aires protégées à savoir les parcs nationaux de la Bénoué, de Bouba Ndjidda et du Faro, et des zones de chasse associées.

D’après Dr Pricelia Tumenta Fobuzie, chercheure à l’université de Dschang, « il y a environ 32 000 lions encore en Afrique, avec moins de 4 000 en Afrique du Centre et de l’Ouest. Le Cameroun est un pays important pour l’espèce, comportant la seconde population après la République Démocratique du Congo, pour l’Afrique Centrale ». Ainsi au Cameroun, les félins se trouvent dans deux unités de conservation aménagées par le gouvernement. Dans sa publication de juillet 2013, Dr Pricelia Tumenta précisait, dans « Nouvelles des aires protégées en Afrique », qu’il existe 250 lions dans le complexe de la Bénoué et environ 20 félins dans le parc national de Waza, dans la région de l’Extrême-Nord, soit un total de 270 lions environ au Cameroun. Elle indique que plus de 95% des lions ont disparu de la surface de la terre au cours des 10 000 ans passés et que, environ 60% des lions du parc national de Waza ont disparu entre 2002 et 2007.

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D’après un article publié sur le site web Francetvinfo.fr, le 23 octobre 2018, il existe moins de 35 000 lions sur l’ensemble du continent africain et d’ici 2035, l’on ne pourrait avoir 10 000 individus de cette espèce. Selon une étude publiée dans le magazine Proceeding of National Academy of Sciences, près de la moitié des lions qui peuplent l’Afrique pourrait disparaitre d’ici 20 ans. Aujourd’hui, il est difficile de donner l’état exact des lions dans le complexe de la Bénoué, « parce qu’au-delà du suivi, des études complémentaires doivent être menées pour faire la lumière et apporter des éléments sur la population exacte des lions », a soutenu René Hamadjida Bobo, chef service régional de la faune et des aires protégées du Nord.

Les grands mammifères

La conservation de la biodiversité reste un souci constant des pouvoirs publics et des organismes partenaires. Cela se décline à travers des ateliers de formation, notamment celui sur la mise à jour du statut des grands mammifères du complexe écologique binational Sena Oura et Bouba Ndjidda qui s’est tenu au mois de novembre 2021, dans l’amphithéâtre de l’école de faune de Garoua. « Notre rôle dans cette école est de former le personnel qui sera chargé de la gestion de la faune et les grands mammifères qui constituent l’une des compétences les plus importantes et visible de cette faune. Nous avons ciblé les espèces phares techniquement appelées espèces parapluies que sont le lion, l’éléphant, le buffle, l’éland de derby et la girafe », a souligné Michel Babalé, directeur de l’Ecole de faune de Garoua.

Le Nord est également plongé dans le Complexe transfrontalier BSB Yamoussa dont font partie les parcs nationaux de Bouba Ndjida au Cameroun et de Sena Oura au Tchad. Cet espace de conservation a vu le jour en août 2011, à la suite d’un accord de coopération signé entre le Cameroun et le Tchad et s’étend sur une superficie d’environ 6 500 km2. Les principales grandes espèces sauvages qu’on y trouve sont : les éléphants, les lions, les buffles, les girafes, les élands de Derby et autres grandes antilopes. Il faut noter que la population des éléphants a été décimée en 2012 par l’abattage d’environ 350 éléphants. D’après certains spécialistes de la faune, il est probable qu’environ 35 à 50% de la population des éléphants abrités par le complexe BSB Yamoussa ait été anéantie par ce grand braconnage organisé à l’échelle internationale.

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Covid-19

La criminalité faunique est pointée du doigt comme responsable de la perte du potentiel faunique. L’homme constitue également une menace du moment où les zones de culture s’étendent sur les lieux d’habitat des félins. En effet, les lions font face à plusieurs sortes de difficultés dans leur environnement. Notamment, la réduction du nombre de proie résultant des phénomènes naturels telles les inondations qui emportent certaines espèces rentrant dans la chaîne alimentaire du lion. Le braconnage de la faune, l’intrusion du bétail pour le pâturage et l’eau, la pêche illicite et le commerce illégal de jeunes lions ou de morceaux de cette espèce sont les principales causes.

En plus de ces obstacles, la pandémie de Covid-19 a également provoqué un choc financier faisant chuter les recettes fauniques. « En 2019-2020, nous avons obtenu le chiffre le plus bas en termes de recette faunique qui s’élevait à 351 millions F Cfa. Une légère hausse a pu être observée à ce jour à hauteur de 13,5%, soit 398,7 millions F Cfa », a exposé Jules Doret Ndongo, ministre des Forêts et de la Faune, à l’occasion du lancement officiel de la saison cynégétique 2022 à Garoua.

Jérôme Baïmélé à Garoua

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