Vin de raphia : De la calebasse à la bouteille, le secret pour une conservation durable
Vin de raphia : De la calebasse à la bouteille, le secret pour une conservation durable
A Bafoussam, dans la région de l’Ouest, un ingénieur a réussi à stabiliser le vin de raphia pour une longue durée de conservation
. Après leur mise en bouteille, cette boisson est commercialisée dans les grandes surfaces, les restaurants… Toutefois, la route est encore longue pour ces entrepreneurs qui peinent à obtenir une certification de plus d’un an.Le quartier Tougang, à Bafoussam chef-lieu de la région de l’Ouest, accueille depuis bientôt 5 ans une usine de pasteurisation du vin de raphia dans les bouteilles. Stève Ngounou Batchanji, le promoteur de ce projet innovant, fait partie de quelques jeunes qui ont réussi à trouver la formule, qui permet de donner une nouvelle vie à cette boisson alcoolisée créée à partir de la sève des raphias, communément appelé « vin blanc »
. Une boisson encrée dans les pratiques cultuelles de la région de l’Ouest.Cette structure dispose d’une unité de stockage de matières premières et d’un laboratoire dédié à la pasteurisation et à la mise en bouteille, du vin de raphia issu particulièrement de la vigne traditionnelle à Bamougoum. « Ces vignerons connaissent les spécificités de la qualité du vin que nous utilisions », souligne le jeune entrepreneur . Dans la zone de production, le refractomètre permet à cet ingénieur de mesurer le degré d’alcool et le Ph. « Nous avons également les capsuleurs. Un pour les capsules et l’autre pour les lièges », renseigne-t-il.
Cet exploit, explique Stève Ngounou Batchanji est « le résultat de ma recherche en master 2 professionnel option food safety effectuée au laboratoire du ministère de la recherche scientifique ». C’est grâce à ses recherches que cet ingénieur a trouvé une solution pour une meilleure conservation du vin de raphia. « Quand on vient de le cueillir, il est sucré. Au fur et à mesure que le temps passe, il se fermente, du fait des levures néfastes qui dégradent le sucre en produisant l’éthanol et le Co2. Dès qu’on neutralise les levures, le vin reste stable pendant une longue période », explique-t-il.
Avec cette innovation, cet entrepreneur et son équipe constituée de six personnes produisent environ 200 bouteilles de 33Cl par jour. Ceci après une préfiltration et un traitement du produit. Le vin embouteillé, capsulé, étiqueté est vendu à 400 F Cfa l’unité, dans les supermarchés et les restaurants de la ville de Bafoussam et lors des foires promotionnelles
. « Je ne cesse d’en consommer. Je salue cette innovation qui nous permet d’avoir constamment du bon vin de raphia à notre portée. C’est une boisson très délicate en termes de conservation, mais je pense qu’avec leur technique, c’est un problème résolu », apprécie Corneille Sop, un consommateur.Bien qu’apprécier par les consommateurs, Steve Ngounou est conscient que la route est encore longue pour assoir une production optimale. Par ailleurs, ce jeune entrepreneur déplore certaines difficultés qui handicapent l’essor de cette structure, parmi lesquelles, la rareté des emballages, le coût exorbitant de la certification de conformité qui atteste que le produit répond aux exigences au niveau de la production, de la transformation ou du conditionnement
. « Nous avons une certification annuelle, renouvelable qui est très coûteuse pour les petites et moyennes entreprises comme la nôtre », déplore cet ingénieur qui n’a pas souhaité dévoiler ses revenus.Pourtant, relève-t-il, cette activité contribue de manière considération à la diversification de l’économie camerounaise. « Conserver du vin de raphia est une belle innovation bien que très peu connue du grand public
. Sur le plan économique, cette activité est salutaire. Elle génère des emplois et des revenus considérables pour les acteurs », note le Dr Boris Wenda, économiste agricole. Il ajoute que le vin de raphia embouteillé est « confronté à des défis non-négligeables. Cette activité est peu réglementée et les normes sanitaires intervenant dans le processus de conservation restent floues ».Aurélien Kanouo Kouénéyé