Agriculture : L’Est enregistre un déficit de 38 tonnes de semences améliorées
Source : Délégation régionale MINADER et PLANOPAC / DataViz: ADISI Cameroun

Selon les statistiques de la délégation régionale de l’Agriculture et du développement rural, seulement 8 tonnes de semences améliorées de maïs ont été livrés à quelques producteurs pour la campagne agricole 2021 contre 40 tonnes en 2020.

Robert M, est un producteur certifié de semence de maïs depuis quelques années à Bertoua dans la région de l’Est. « J’ai été formé par la délégation régionale de l’Agriculture et du développement rural (DRADER) de l’Est et depuis lors je produis chaque année environ 2 à 3 tonnes de semences de maïs », déclare-t-il.

Curieusement, au quartier Mokolo 4 à Bertoua, c’est plutôt le manioc qui pousse désormais dans cette plantation autrefois réservée à la production des semences du maïs. Pour la campagne agricole 2021 en effet, Robert M n’a pas investi dans la production de semences. « La culture du maïs nécessite une pluie abondante et constante or lors de la deuxième campagne agricole de l’année dernière, les agriculteurs ont été victimes de la longue saison sèche qui a déjoué les pronostiques dont je n’ai presque rien récolté comme semence de maïs. C’est pourquoi, cette année j’ai préféré convertir mon champ à la culture du manioc qui est plus résistante face à la rareté des pluies », dit-il.

L’expérience malheureuse de Robert M a été vécue par tous les producteurs de semences de la région de l’Est. Selon la DRADER « la région de l’Est compte entre 10 et 15 multiplicateurs de semences certifiées qui produisent des semences agricoles chaque année pour mettre à la disposition des producteurs ». Une information confirmée par la Plateforme nationale des organisations professionnelles agro-sylvo-pastorales et halieutique du Cameroun (PLANOPAC). « La plupart de ces semenciers produisent les semences du maïs, le manioc et le cacao, les filières les plus actives », reconnait Mboble Dob président régional de la PLANOPAC.

Source : Délégation régionale MINADER et PLANOPAC / DataViz: ADISI Cameroun

Mais en 2020, la production des semences en général et celle du maïs en particulier était presque nulle. Selon les statistiques de la délégation régionale du MINADER, « seulement 8 tonnes de semence améliorées du maïs, capables de donner de bon rendement ont été livrés à quelques producteurs en début de la campagne agricole 2021 contre 40 tonnes livrées en 2020 ». Pour NEK, délégué régional du MINADER, « les producteurs n’ont pas produit à cause de la sécheresse du mois d’août 2020 ». Ces sont ces derniers qui livrent les semences sur commande au MINADER, qui redistribue avec d’autres intrants et outillages aux producteurs en début de la campagne agricole sous forme d’appui d’Etat. 

Changements climatiques

Outres les changements climatiques, les producteurs de l’Est sont confrontés à d’autres obstacles. « Les producteurs n’ont pas les semences de base certifiées et l’expertise nécessaire. En 2020, c’est la FAO qui a fourni quelques semences de base. Dont déjà, les semences de base étaient insuffisantes pour produire les semences en quantité et qualité pour la campagne de 2021 », explique Mboble Dob. Plus grave, certains producteurs sont paralysés et réclament les arrières d’impayés auprès du MINADER.  « Depuis 2014, les producteurs de semences de maïs de la région de l’Est ont produit et livré des semences au ministère à hauteur de plusieurs millions FCFA. Jusqu’à présent, certains de ces semenciers n’ont pas encore été payés. Toutes les tentatives de réclamation sont restées sans réponses. Sachant que vous alliez présider l’ouverture du mini-comice, ceux-ci nous ont demandé de porter directement à votre attention leurs doléances car certains d’entre eux sont découragés et leurs activités ont pris un coup sérieux », avait alors déclaré le représentant des producteurs de l’Est au Minader, Gabriel Mbairobe lors du mini-comice agropastoral de l’Est en décembre 2020.

En plus indique Jérémie Baka, inspecteur semencier régional du service régional du contrôle de qualité des intrants et produits agricoles, « il y a des semenciers qui ne connaissent pas les textes et ne respectent pas les normes de production et aussi les difficultés de conservation ». Pour résoudre ces problèmes, la délégation régionale de l’Est s’attèle à la sensibilisation et au respect de la Loi 2001/014 du 23 juillet 2001 relative à l’activité semencier.  

Face à la pénurie de semences améliorées, les producteurs se sont débrouillés, chacun à sa manière pour affronter la campagne agricole 2021« J’étais obligé d’acheter quelques grains du maïs au marché Central de Bertoua pour mon champ parce ce qu’à Batouri, il n’y avait rien », se lamente Thomas Mboné, installé au quartier Mongo-nam à Batouri. Cet agriculteur a décidé de s’orienter désormais vers la production des plantes médicinales dont les semences se trouvent facilement dans la forêt. Comme lui, Fonyou Maxwell, cultivateur à Koba, situé à 5 km de Bertoua n’a pas cultivé cette saison. Pour lui, en plus du manque de semences et le mauvais rendement agricole « le faible pouvoir d’achat des consommateurs n’est pas encourageant ». 

 Le mauvais rendement agricole en perspectif dans la région de l’Est en 2021 laisse planer le spectre de l’insécurité alimentaire caractérisée par des pénuries des produits agricoles sur le marché. Surtout que cette région a connu une croissance exponentielle de la population due à l’arrivée massive des réfugiés centrafricains depuis 2013 et les déplacés internes en provenance des zones de crise.

Sébastian Chi Elvido à l’Est

 

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