Aviculture : « Le poulet Goliath est la race adaptée au climat du Grand Nord »
Daouda Sadou, président de la coopérative des aviculteurs du septentrion (Avisep)

Aviculture : « Le poulet Goliath est la race adaptée au climat du Grand Nord »

Daouda Sadou, président de la Aviculture du Grand Nord coopérative des aviculteurs du septentrion (Avisep) apporte des précisions sur la nouvelle race de poulet, baptisée « poulet Goliath », développée au Grand Nord. Pour cet aviculteur, l’appui gouvernemental sera nécessaire pour vulgariser cette race à grande échelle.

Aviculture du Grand Nord Quel est l’état des lieux de la production des poulets dans le Grand-Nord ?

J’avais installé en 2010 certains représentants de la profession ici à Garoua. Malheureusement 10 ans après, je me suis rendu compte que la filière n’a pas décollé. J’ai préféré rentrer au bercail pour donner un coup de pouce afin de faire décoller la filière avicole. A mon arrivée, c’était un peu trop timide. Mais aujourd’hui, j’ose avouer que, à Garoua, nous pouvons dénombrer au moins 112 éleveurs de poulet ; à Maroua, c’est environ 200 éleveurs. Ngaoundéré est un peu plus avancé que nous, on peut avoir entre 300 et 350 éleveurs dans l’Adamaoua.

Selon vous, pourquoi la filière avicole tarde encore à décoller dans le Nord ?

C’est parce que nous avons des difficultés d’acquisition de poussins d’un jour. C’est pour cette raison que nous nous sommes tournés vers le poulet Goliath, qui pour nous, est facile à acquérir en faisant des croisements avec des reproducteurs industriels et nous sommes en phase de décollage avec cette race. Pour l’acquisition des poussins, nous envisageons faire des fermes parentales. Nous avons des machines installées d’une capacité de 72 000 œufs. Dès que ces machines seront en activité, nous serons à la hauteur de produire approximativement 25 000 poussins par semaine. Les poulets de chair prennent également de l’envol à Garoua. Ce qui n’arrive pas à bien se développer c’est la poule pondeuse. L’éleveur nordiste veut gagner tout de suite. Or, la pondeuse est une industrie, c’est elle qui produit, qui vous donne entre 315 et 320 œufs l’an. On ne l’élève pas pour deux ou trois jours, mais pour au moins un an et demi, elles doivent manger, boire et pondre. Et c’est ce que nous ne connaissons pas ici. 90% de nos œufs viennent de l’Ouest et pourtant nous avons tous les atouts pour produire sur place. On a plus de 80% de la nutrition de la volaille chez nous. Toutefois, je parie que d’ici 5 à 10 ans, l’élevage va décoller dans le Grand Nord.

Vous expérimentez l’élevage du poulet Goliath depuis cinq ans. Quelles sont ses mérites ?

Les poulets Goliath n’existent pas ailleurs au Cameroun sauf à Garoua, chez moi ici à Nassarao. C’est une race locale améliorée. Nous avions constaté que nos races locales qu’on appelle poulet bicyclette ou poulet villageois ne pèsent pas en chair. Nous avons fait des croisements entre le poulet bicyclette et la chair industrielle. Et c’est à l’issu de quatre croisements entre la chair industrielle, la ponte industrielle et le poulet bicyclette que nous avons obtenu les poulets Goliath. Ce sont les béninois qui ont créés la race des poulets Goliath. Ils sont d’abord plus forts, charnus en chair et s’adaptent mieux à notre climat car, ils portent les gènes des poulets bicyclettes. Le poulet Goliath est la race adaptée au climat du Grand Nord. Nous attendons que les pouvoirs publics nous donnent un coup de pouce pour les vulgariser à grande échelle. Les poulets bicyclettes sont les poulets villageois et on les appelle ainsi parce qu’on les accrochait toujours sur le guidon d’une bicyclette pour les transporter au marché.

Qu’est qui vous a motivé à embrasser la filière avicole, alors que vous êtes ingénieur électricien ?

C’est par amour pour la volaille dès le bas âge. Quand j’étais jeune, j’élevais quelques poulets du village et des canards. J’ai ensuite travaillé à la Société Nationale d’Electricité du Cameroun (Sonel) pendant 19 ans. Etant là-bas, je continuais toujours à œuvrer dans mon petit élevage. C’est lorsque je travaillais à Yaoundé que j’ai rencontré ceux qui élèvent les poulets industriels et je me suis lancé. Mes installations avaient commencé à prendre une certaine allure. Je suis allé m’inscrire dans le Syndicat interprofessionnel des aviculteurs du Cameroun (Sifac). La profession se développait avec l’entrée de plusieurs aviculteurs. Le ministère de l’Elevage, des Pêches et des Industries Animales (Minepia) qui assure la tutelle nous a mis en contact avec un projet. Ce projet nous a accompagné jusqu’à la création de l’interprofession avicole. Je suis allé en côte d’Ivoire voir comment leur interprofession est structurée. Nous avons rencontré les professionnels de l’aviculture ivoirienne. Certains sont allés en Egypte, nous avions sollicité la France, et tout ça dans le cadre du projet. C’est à partir des expériences puisées dans ces trois pays qu’est née l’Interprofession avicole du Cameroun (Ipavic) où je suis membre fondateur. J’ai été membre du conseil d’administration, et représentant du Nord, Extrême-Nord, Adamaoua, cumulativement avec le Centre, le Sud et l’Est. Aujourd’hui, je suis dans l’équipe d’éthique et de la discipline de l’interprofession et président de la coopérative des aviculteurs du septentrion (Avisep).

Quelles sont les difficultés que vous rencontrez dans la filière avicole et dans la vulgarisation de la Goliath ?

Dans la partie septentrionale, les gens commencent déjà à connaitre les poulets Goliath. Je ne peux pas rester une journée sans vendre au moins à trois clients nouveaux et ça c’est déjà un bon élan. Je produits à peu près 250 poussins chaque semaine. Et j’arrive à écouler au moins 70 à 80%. Le marché prend de plus en plus de l’ampleur. La filière avicole connait des problèmes surtout avec la peste aviaire et la plus récurrentes qui est la grippe aviaire. Cette maladie est là mais elle n’est pas présente dans le Grand Nord. Elle est à l’Ouest. Avec des barrières sanitaires, on a essayé de la confiner seulement là-bas. Je pense qu’on est en train de la maitriser déjà. Avec la Goliath, nous ne serons pas très dépendants des importations d’où vient la grippe aviaire. Nous maitrisons les autres pathologies, on vaccine régulièrement la volaille pour barrer la voie aux maladies.

Propos recueillis par Jérôme Baïmélé à Garoua.

 

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