Médias/Cameroun : Une douzaine de journalistes camerounais torturés entre 2017 et 2019

Dans son rapport Analytique sur la situation des journalistes au Cameroun, ADISI- Cameroun en collaboration avec African Freedom of expression exchange, révèle qu’entre 2017 et 2019, une douzaine de journalistes camerounais ont été arrêtés, intimidés ou menacés par des acteurs étatiques et non étatiques.

Depuis 2017, Brenda Kiven journaliste à la Radio Hot Cocoa vit loin de sa famille, dans une ville camerounaise où elle a trouvé refuge. Après avoir subie des menaces de la Police Judiciaire, cette journaliste qui était alors basée à Bamenda dans la région du Nord-Ouest Cameroun, paralysée par une crise sociopolitique dite « anglophone », a été contrainte de quitter sa famille pour se mettre à l’abri d’une arrestation prévisible. En effet, le 8 février 2017,  la police Judiciaire a débarqué dans son domicile sans aucun  document de perquisition. Elle a  fouillé la maison   de fond en comble, avant d’emporter son laptop, son principal outil de travail, jusqu’aujourd’hui confisqué.

Comme Brenda Kiven, Atia Azohnwi le journaliste de Sun Newspaper a été arrêté à Buea en septembre 2017 et enfermé à la Prison centrale de Yaoundé jusqu’en octobre 2018. Une  douzaine d’Hommes de médias ont,  entre 2017 et 2019,  été arrêtés, intimidés ou menacés par des acteurs étatiques et non étatiques principalement à  Douala, Yaoundé, Buea, Bamenda et Kumba. Environ 23% de femmes et 77% d’hommes. Ontrévélé l’African Freedom for Expression Exchange- Afex en collaboration avecl’Association pour le Développement Intégré et la Solidarité Interactive (ADISICameroun) dans leur rapport« Analytique sur la situation des journalistes au Cameroun entre 2017-2019 », publié le 20 septembre 2019.

Ces menaces et détentions arbitraires sont en majorités tributaires de deux facteurs majeurs à savoir à la Crise Anglophone qui sévit dans les Régions du Nord-Ouest et Sud-Ouest depuis 2016 et la crise post-électorale au lendemain de la dernière présidentielle au Cameroun.Les journalistes qui exercent dans les régions anglophones, sont régulièrement la cible des groupes séparatistes et même du gouvernement.

A lire aussi :  Consommation : les prix des denrées flambent dans les marchés de Douala

Constitution

« L’année 2018 qui a été une année électorale, a été elle aussi, particulièrement difficile pour la liberté de la presse en général et la sécurité des journalistes au Cameroun », souligne le rapport. Pourtant, précise les deux organisations, le droit à la liberté d’expression et son corollaire, l’accès à l’information sont garantis dans la Constitution du Cameroun ainsi que dans des mécanismes régionaux et internationaux que le gouvernement camerounais a signés et même ratifiés. Ces mécanismes comprennent les accords et les traités qui ont été ratifiés ou signés aux niveaux régional et international.« Plusieurs médias en ce moment au Cameroun, subissent sur les réseaux sociaux, des attaques violentes des citoyens à cause de leur ligne éditoriale. C’est le cas d’Equinoxe émettant depuis Douala taxé à tort ou à raison de ternir l’image du pays », déclarent-elle.

Si de façon tangible l’on ne peut démontrer que ces situations étaient à la base des violations des libertés de la presse, relève cette étude, le caractère exceptionnel peut pour autant s’y prêter. Le pouvoir de Yaoundé se montrant depuis plusieurs années par ailleurs, très frileux en ce qui concerne les libertés publiques. Même si dans certains cas, ces journalistes arrêtés ou molestés peuvent être considérés comme des victimes collatérales, dans d’autres cas, on peut y voir sans ambages, des règlements des comptes de la part des pouvoirs publics.

La lutte contre l’impunité pour les crimes contre les journalistes au Cameroun est un défi majeur qui nécessite la collaboration de toutes les parties prenantes au Cameroun selon les rédacteurs dudit rapport. A cet effet, elles recommandent aux journalistes, de renforcer ou de créer un syndicat plus fort capable de porter les aspirations de la toute la corporation, de respecter l’éthique et la déontologie ; de rétablir les fonds de soutien aux médias pour les journalistes ; de former et recycler  vers les nouvelles approches et techniques de journalisme ; d’adopter et promouvoir le code de bonne conduite des journalistes du Cameroun. Aux Promoteurs de médias, il est préconisé le respect de la convention collective des journalistes ; de la sécurité sociale des journalistes afin de garantir leur vieux jour ; la création d’une mutuelle des journalistes afin d’aider ceux-ci à faire face à leur précarité ambiante.

A lire aussi :  Consommation : les prix des denrées flambent dans les marchés de Douala

Le Gouvernement doit pour sa part, travailler entre autres, pour la  mise en œuvre des recommandations des états généraux de la communication de 2015 ;  l’adoption d’une loi sur l’accès à l’information et aux données publiques afin de faciliter l’accès aux sources des journalistes ;  la reforme de la loi 1990 sur la communication sociale au Cameroun pour que celle-ci intègre les nouveaux paradigmes de la société d’information ; la dépénalisation du  délit de presse; la sanction de tous ceux qui se rendent coupable de violation sur les droits des journalistes. Il est attendu de la  Société civile,  la  sensibilisation du pouvoir public sur la nécessité d’avoir une presse libre et indépendante ; un appui régulier  des journalistes dans la défense de leurs droits.

Marie Louise MAMGUE